La fraîcheur et la pureté des saveurs font la différence

Le Français Stéphane Glacier, propriétaire de Pâtisserie et Gourmandises et entraîneur de l'équipe de France à la Coupe du Monde, constate que dans les compétitions professionnelles internationales, on remet en avant les saveurs, les textures et les techniques par rapport au côté artistique. "Dans le passé, nous avons vu que les gens étaient formés à la réalisation des sculptures les plus étonnantes cependant, il ne faut pas délaisser le goût des glaces et des pâtisseries ! En fin de compte, notre profession reste axée sur des saveurs bien marquées, des combinaisons intéressantes et des alliances savoureuses."

Des saveurs perdues

Et c'est en cet artisanat que Stéphane Glacier voit un grand défi. "70% des pâtissiers en France achètent de la viennoiserie surgelée. Cela signifie qu'ils oublient comment faire eux-mêmes un croissant ou un pain au chocolat. Le résultat ? Les saveurs sont de plus en plus fades et la gamme de produits ne se distingue plus, même lorsqu'on la compare à celle des supermarchés. Après tout, ils utilisent les mêmes boîtes, non ? Pourtant, les supermarchés proposent ces produits moins chers, ils ont des heures d'ouverture plus longues et cuisent plusieurs fois par jour. Pas étonnant que les boulangers perdent la bataille. Mes croissants ont une forme et un poids légèrement différents. Ils sont cuits sur la plaque du four et fourrés de mon praliné maison. En effet, ils sont un peu plus chers. Mais mes clients sont prêts à payer pour cela : ils ont conscience de la différence."

Instagrammable

M. Glacier voit également un fossé se creuser dans le monde de la pâtisserie et il ne pense pas que cette tendance soit forcement positive. "D'un côté, vous avez les pâtissiers de formation classique qui ont leur propre entreprise. De l'autre côté, vous avez les pâtissiers des réseaux sociaux. Des stars d'Instagram, qui savent parfaitement à quoi doit ressembler un produit et qui sont tout aussi passionnés que moi par ce qu'ils font. La grande différence est qu'ils n'ont pas à fabriquer ou à vendre des pâtisseries. Ils montrent des photos d'un produit unique et n'ont aucune idée de ce que cela signifie de le fabriquer, en toute rationalité."

Obligation d'automatiser

Le risque de cette tendance est que de nombreux jeunes ne sont plus intéressés que par cette facette de la pâtisserie et qu'ils délaissent peu à peu les concours et les titres, pour ne passer que sur de la beauté instantannée. "Il ne faut pas faire paraître ce métier meilleur qu'il ne l'est. Il est physiquement exigeant et nécessite beaucoup de travail manuel. Beaucoup de jeunes abandonnent, parfois même pendant leurs études. Du coup, il y a un manque de bras et de main-d'œuvre dans la production et nous sommes de plus en plus obligés d'automatiser."

L'artisanat

Stéphane Glacier veut inverser la tendance. Il souhaite que le nombre d'étudiants dans les écoles de pâtisserie, où on leur enseigne les bases du métier, augmente. "Le savoir-faire artisanal va faire la différence", affirme Glacier. "La clé du succès aujourd'hui est la réaliser de ses propres créations autant que possible". Gâteau au citron à partir de citrons biologiques pressés à la main, avec le zeste encore présent. Tartes aux pommes avec de la compote maison et des pommes fraîchement épluchées. De la crème fraîche, du beurre au lieu de la margarine et de la vanille correctement dosée. Les clients ne s'intéressent pas seulement au prix. Si vous faites des concessions sur la qualité ou le coût de vos matières premières, vous vous retrouverez encore plus bas dans les classements. Dans ce cas, les clients commenceront certainement à comparer les prix pour un seul et même produit. Si la qualité et le goût sont excellents, les gens sont vraiment prêts à payer plus. La fraîcheur et les ingrédients de bonne qualité feront toujours la différence."